Tout d’abord, je pense que c’est un bon angle de critique de la société et du système de gouvernement actuel. La démocratie est relève de l’intérêt général lorsque l’oligarchie relève de l’intérêt particulier.
Ensuite il ne faut pas vraiment confondre les USA et la France : les deux ont des histoires fortement différentes, l’une est Etat-Nation au contraire de l’autre, et l’idéal de pouvoir créer une entreprise est bien plus ancré aux USA qu’en France : Rien de plus normale que de laisser les entreprises faire ce qu’elles veulent, elles sont composées de citoyens qui réalisent « leur rêve » (« ceux qui ne réussissent pas pouvaient essayer). Que ce problème ne soit pas régulé là-bas n’est pas étonnant. Mais vous avez raison d’une certaine manière car le pouvoir des multinationales est mondial, ce qui fait leur force face aux institutions publiques qui reste nationales : une des forces voulues pour l’UE est qu’en homogénéisant les normes au niveau européen, les entreprises doivent se plier à celles-ci pour pouvoir conquérir ce marché (très riche et immense). Et avec un système libéral où tout peut se faire dans n’importe quel endroit sans contrainte, c’est l’endroit le moins cher qui gagne la mise pour la production du bien : l’intérêt se trouve uniquement en termes de profits de l’entreprise. Du point de vue de l’institution publique, on se retrouve toujours dans le chantage à l’emploi, même si celui-ci n’est que limité temporellement. Vous ne parlez aussi pas des financements des communes, Etats, qui se font par des banques privées (sur le marché de la dette), ce qui ajoute dans la restriction et le chantage possible.
Donc les solutions envisagées sont les suivantes :
-soit on légifère sur les produits mis sur le marché ce qui oblige les entreprises qui veulent vendre à s’adapter : problème ne peut que difficilement s’appliquer pour interdire des produits déjà utilisé, chantage emploi.
- soit on légifère sur les taxes douanières ce qui oblige les entreprises qui veulent accéder au marché, à se relocaliser à l’endroit du marché. (Actuellement légiféré au niveau européen ce qui pose problème pour le changer) problème : comment taxer des produits, services lorsqu’ils sont dématérialisé (sur internet) (Exemple, Airbnb : Comment Airbnb échappe à l'impôt en France - Le Parisien ) , même chose pour les GAFA : il suffira de positionner les entreprises à un endroit où l’impôt est bas puis effectuer tout un tas d’activité dans ce pays, laissant que quelques activités dans le pays où vraiment lieu la transaction, etc…
Bienvenue dans une nouvelle ère :
Celui d’une société gouvernée par une petite minorité de «sachants» des connaissances numériques, sans autre objectif politique que la poursuite de ses intérêts propres, et une majorité vivant dans des conditions de précarité croissante, anesthésiée par l’industrie des jeux addictifs et de contenus médias standardisés contenant toute révolte.
Cette synthèse parfaite de la tyrannie douce de Tocqueville et de la société du spectacle de Debord nous pend au nez » (Les GAFA élevés au rang de puissance diplomatique ou la tyrannie des géants du Web ) ou Laisser les GAFA seuls maîtres de notre avenir ? Hum... Comment dire ? - Méta-media | La révolution de l'information
Le souci est qu’il y aura toujours ce genre de problèmes tant que les consommateurs ne pourront pas arrêter cette course en avant . Cette prise de conscience et d’action pourrait se faire lorsque le consommateur devient citoyen, c’est-à-dire lorsqu’il devient responsable politiquement, et ne délègue pas la politique une fois tous les 5 ans.
Sinon c’est la mort de l’Etat et le début de l’anarcho-capitalisme ou la tyrannie des entreprises.
Un extrait de La République (Platon) qui ressemble à ce qui se passe (avec les solutions de l’époque) :
Ainsi dans les oligarchies, c’est en les négligeant et en les laissant se dévergonder, que l’on contraint quelquefois des hommes qui ne sont pas sans naissance à devenir des pauvres.
— Oui, exactement.
— Dès lors ces hommes restent assis là dans la cité, armés de leurs aiguillons, les uns chargés de dettes, les autres privés de leurs droits, d’autres subissant l’un et l’autre malheur, pleins de haine et de mauvais projets contre ceux qui ont acquis leurs biens, et contre les autres, et désireux de voir l’avènement d’un régime nouveau.
e — C’est cela.
— Les acquéreurs de richesses, eux, recroquevillés, ne semblant pas voir les précédents, piquent quiconque parmi les autres veut bien se laisser faire, en lui faisant une injection d’argent ; et en multipliant ainsi les intérêts qu’ils amassent, rejetons de leur capital, 556 ils multiplient en fait faux-bourdons et mendiants dans la cité.
— En effet, dit-il, comment ne le feraient-ils pas ?
— Et de plus, dis-je, ils ne veulent éteindre ce genre de mal dont les flammes se répandent, ni par le premier moyen, en empêchant qu’on consacre ses propres biens à en faire ce qu’on veut, ni par un autre moyen, par lequel, en vertu d’une autre loi, on peut résoudre ce genre de problèmes.
— Quelle loi ? Une loi qui viendrait en second, après celle de tout à l’heure, et qui contraindrait les citoyens à se soucier d’honnêteté. Si l’on prescrivait en effet de conclure la plupart des contrats volontaires b aux risques du prêteur, on s’enrichirait de manière moins éhontée dans la cité, et s’y développeraient en moins grand nombre ces fléaux dont nous parlions à l’instant.
— Beaucoup moins, dit-il.
— Mais à présent, dis-je, pour toutes ces raisons, telle est la situation à laquelle les dirigeants réduisent les dirigés ; d’autre part, pour ce qui est d’eux-mêmes et des leurs, ne rendent-ils pas leurs jeunes, à force de luxe, incapables aussi bien des travaux du corps que de ceux de l’âme, trop tendres pour s’endurcir c contre plaisirs et souffrances, et paresseux ?
— Si, bien sûr.
— Quant à eux-mêmes, ne se transforment-ils pas en hommes insoucieux de tout ce qui n’est pas l’enrichissement, et qui ne se soucient pas plus d’excellence que ne le font les pauvres ?
— En effet.
— Lorsque ainsi disposés les dirigeants et les dirigés se retrouvent côte à côte, quand ils cheminent sur les routes, ou lors d’autres occasions de vie en commun, lors de pèlerinages, ou d’expéditions guerrières, qu’ils naviguent ensemble ou soient compagnons à la guerre, ou encore au milieu même des dangers, d et qu’ils se regardent les uns les autres, alors ce ne sont nullement les pauvres qui sont méprisés par les riches ; souvent au contraire lorsqu’un homme pauvre, maigre, tanné par le soleil, est placé dans la bataille à côté d’un homme riche élevé à l’ombre, avec sur lui toute une chair en trop, et qu’il le voit essoufflé et embarrassé, ne crois-tu pas qu’il pense que c’est bien de leur faute, à eux les pauvres, si de tels hommes sont riches ? et ne crois-tu pas que les pauvres, quand ils se retrouvent entre eux, se passent le mot : « Ces hommes sont à notre merci ! e ils ne sont rien ! »
— Si, dit-il, je sais bien que c’est ce qu’ils font.
— Par conséquent, de la même façon qu’un corps maladif n’a besoin que de recevoir une petite impulsion du dehors pour tomber malade, et que quelquefois même, sans rien d’extérieur, il entre en dissension avec lui-même, de même la cité qui est dans les mêmes dispositions que lui, au moindre prétexte, que les uns demandent alliance à l’extérieur à une cité gouvernée de façon oligarchique, ou les autres à une cité gouvernée démocratiquement, tombe malade et se combat elle-même, et quelquefois même entre en dissension interne sans que des éléments extérieurs soient intervenus ?
557 — Oui, exactement.
— Or la démocratie, je crois, naît lorsque après leur victoire, les pauvres mettent à mort un certain nombre des autres habitants, en expulsent d’autres, et font participer ceux qui restent, à égalité, au régime politique et aux charges de direction, et quand, dans la plupart des cas, c’est par le tirage au sort qu’y sont dévolues les charges de direction.
— Oui, dit-il, c’est comme cela que la démocratie est instituée, que cela ait lieu par les armes, ou encore que l’autre parti, intimidé, cède la place.