Origines et pratiques de la démocratie

Bonjour à tous,
Voici un petit livret sur l’origine de la démocratie:

Il vient du livre de David Graeber « La démocratie aux marges », publié en 2014
Certains points ont déjà été évoqués par Datagueule, mais ce livre va plus loin en renversant quelques illusions: les premières démocraties et le lien entre Etat et démocratie. Un petit résumé:

En premier lieu, il faut considérer que la démocratie n’est pas une conception occidentale car l’on ne peut envisager la civilisation occidentale autrement que comme une tradition intellectuelle qui s’avère « aussi hostile que la tradition indienne, chinoise ou méso-américaine à quoi que ce soit qu’on puisse considérer comme relevant de la démocratie ».

En deuxième lieu, les pratiques démocratiques ont généralement émergé dans des espaces interstitiels qui échappent au contrôle de l’État.

En troisième lieu, l’idéal démocratique est le fruit d’une conjoncture spécifique, propice à l’élaboration de nouveaux récits politiques par les intellectuels et les hommes politiques. Les destructions liées à l’expansion européenne au cours des XVIIIe et XIXe siècles se sont révélées favorables au brouillage des frontières et, en définitive, à la récupération de telles pratiques au bénéfice d’un processus « de refondation démocratique ». Ce processus est inclus dans un mouvement plus vaste – il déborde largement ce que l’on nomme aujourd’hui l’« Occident ».

L’opposition entre « républiques » – entités de nature généralement peu démocratique – et « démocratie » relève des contradictions inhérentes à cet idéal et, plus spécifiquement, de son souhait d’unir l’appareil coercitif de l’État et les pratiques démocratiques. Enfin, si la démocratie a aujourd’hui un avenir, c’est en dehors des frontières de l’État. "

A noter que l’auteur, anthropologue, a écrit d’autres livres comme « Bureaucratie: l’utopie des règles » ou « Dettes 5000 ans d’histoire » qui éclairent énormément sur la société actuelle. Un interview sur france inter:

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Si les origines (réelles ou supposées) de la démocraties sont abondamment analysées dans ce livret, le côté pratique est abordé avec un biais évident. Pour l’auteur, l’état est définit par le monopole de la coercition, donc en contradiction fondamentale avec le démocratie idéale. Il propose que l’anarchie est une solution raisonnable, mais ne cesse de décrire des communautés organisées, donc pas anarchiques.

Une fois encore, les exemples de systèmes politiques avec des instruments de démocratie direct efficaces sont tout simplement ignorés. Je pense pourtant que ces sont des alternatives préférables à l’anarchie proposée par l’auteur.

Je crois que c’est un peu difficile de vous répondre, puisque je n’ai pas votre définition de l’anarchisme ou celle de l’Etat.
En fait, je pense que l’auteur désigne par anarchie, ce qui n’a pas un pouvoir unique coercitif (cad l’opposé de l’Etat). Mais il peut y avoir des organisations, des communautés organisés anarchiques : à ce moment le pouvoir est partagé.
Mais je suis d’accord avec vous, l’exemple de la Suisse n’y ait pas décrit.
Il fait d’ailleurs un long paragraphe sur l’impossibilité d’avoir un Etat démocratique du fait des inégalités qui sont maintenus par l’appareil coercitif de l’ETat. Ce n’est pas le cas vraiment en Suisse, donc ce raisonnement n’est pas tout à fait vrai (même si on peut souligner le côté semi-directe en Suisse).
En reprenant le même raisonnement que l’auteur: « l’Etat monopole de la coercition », qui maintient les inégalités ==> pas de démocratie.
On peut voir deux possibilités où cette proposition peut être fausse:

  • un autre type d’égalité que les inégalités de richesse. Il est vrai que l’égalité dans le processus de gouvernement (création lois,…) est nécessaire mais il peut n’être pas suffisant: exemple du contrôle des médias, du contrôle des « experts » ==> débat seulement dirigé par ceux qui peuvent les contrôler, cad les plus riches.
  • les inégalités de richesse sont contenus grâce aux inégalités face aux autres pays:les produits de faibles valeurs peuvent être achetés à bas prix grâce aux importations venant de pays pauvres. ==> libéralisme économique (Suisse cas parfait).
    A noter que l’Etat est organe de pouvoir qui dépérit actuellement:
    -par des pouvoirs supra-etatique: OMC, ONU, etc…
    -par des pouvoirs infra-étatique: entreprises, ONG, etc…
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Si il est indiscutable que certains systèmes politiques sont utilisés pour maintenir des inégalités, je ne pense pas que tout les systèmes politiques ont délibérément ce but, impression que me donne l’auteur du livret. Là où les instruments de démocraties directs efficaces sont utilisés (pas seulement en Suisse) l’accès à la décision politique est disponible pour chaque citoyen, quelque soit sa situation, et constitue donc un moyen de créer un pourvoir plus égalitaire. Comme vous, je pense que ce point est en contradiction avec l’argumentation de l’auteur.

Votre dernier point est intéressant car également développé dans le livret. C’est un sujet constamment débattu en Suisse depuis la création de l’UE: Va-t-on abandonner de la souveraineté pour s’intégrer dans l’UE, ou va-t-on défendre la souveraineté malgré les évidents problèmes que cela pose. J’observe que la situation a beaucoup changée dans le peuple Suisse. Si à la création de l’UE, les Suisse ont refusé plus par scepticisme (attendons de voir avant d’agir), actuellement la majorité de la population Suisse a le principe du système politiques de l’UE en grippe et ça ne semble pas près de s’arranger. Quand on est habitué depuis si longtemps à voter régulièrement sur tout, la quasi dictature de la Commission Européenne sur les évolution des constitutions nationales apparaît pour le moins choquante. C’est vraiment un exemple de pouvoir d’État qui dépérit, piloté indirectement mais fermement depuis l’extérieur plutôt que par le peuple de la nation. Donc je vous rejoint entièrement sur ce point. Mais bien que ce soit actuellement particulièrement acrobatique pour la Suisse, je garde l’espoir que la politique et le système politique de l’UE évolue.