Laboratoire puclic de recherche en démocratie

Bonjour. Je me suis demandé comment savoir si un sujet était pris au sérieux par l’État. Je me suis dit tiens en informatique on a des laboratoires publics de recherche comme l’Inria, tiens en agriculture on a l’Inra, tiens pour tel sujet on a tel laboratoire et tiens pour la démocratie on n’a pas d’Inred (Institue national de recherche en démocratie).

Je trouve cela très étrange que dans une démocratie avancée comme la nôtre on est pas plusieurs centres de recherches uniquement dédier à la question de la démocratie. Dans ces centres se rencontreraient des mathématiciens, des sociologues, des historiens, … qui auraient pour missions d’esquisser plusieurs trajectoires possibles que pourrait prendre la démocratie (sur des fondements scientifiques solides).

Voilà les questions que je me pose :
Est-ce que la démocratie est un sujet de fond pris au sérieux par l’État ?
Est-ce souhaitable de créer des centres de recherche publique en démocratie ?

Pour le moment je n’est pas vraiment de réponse à ces questions, car je ne sais pas qui interroger et c’est pour cela que je poste mon message ici.

J’aimerais avoir vos avis sur la question.
Merci pour votre attention.

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En ce qui concerne la Suisse, la réponse est clairement oui. Les instruments de démocratie direct y sont largement mis en avant par le gouvernement. La souveraineté du peuple une valeurs très fondamentale pour tous les citoyens Suisse et la cause principale du conflit avec UE. Le gouvernement est ici plus que jamais obligé de défendre la démocratie (semi-) direct.

Il me semble que dans beaucoup de pays démocratique il y a des universités qui ont des spécialisations dans le domaine de la politique. A des degrés différents, certaines font des travaux de recherche en politique. Je ne sais pas à quel point l’état influence la création de ces compétences. J’imagine que c’est très différent pour chaque cas.

Prendre conscience que les français laissent à leur parlement l’exclusivité de la recherche de l’amélioration du gouvernement représentatif de la 5ème république, c’est peut-être une façon de voir que nous ne sommes pas dans une démocratie.

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J’ai une autre question. Pourquoi le terme démocratie n’est pas défini dans la constitution ? (C’est même pas définie dans la loi) Si les lois régissant les rapports dans une société ne définissent pas ce qu’est une démocratie, est-ce qu’on est en démocratie alors ? Ma réponse est non (par rapport à la loi) puisqu’on ne définit même pas de quoi on parle. (Et je viens de remarquer que c’était pareil pour plein de mot de loi)

J’ai testé ce que je viens d’écrire sur le site https://www.legifrance.gouv.fr qui diffuse des textes législatifs du droit français en recherchant tous les textes contenants démocraties avec le moteur interne de recherche (et aussi avec un moteur externe de recherche pour être sûr)

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Les multiples définitions possibles du terme « démocratie » ont fait l’objets de plusieurs débats particulièrement animés sur cet agora. Cette expérience a montré combien c’est difficile de trouver une définition qui soit acceptable pour tous. Je n’ose même pas imaginer les débats que provoqueraient les travaux pour la définir dans une constitution…

Ce qui est important dans une constitution, ce sont les garanties données et les procédures décrites pour faire fonctionner le système politique.

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Oui, je comprends que ça serait compliqué. Mais si on n’a pas de référence théorique, une sorte de code de la démocratie dans la loi, qui définit de quoi on parle on ne peut pas comparer l’état de démocratie réel avec la démocratie théorique. Si on avait la description d’une démocratie théorique dans la loi, il serait plus facile de dire ce qu’il faudrait changer.

Et en plus, si on ne le définit pas, on peut manipuler le concept pour en faire quelque chose à géométrie variable en fonction de ce qui arrange…

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Je pense que la démocratie est prise très au sérieux par l’état.

La démocratie, c’est permettre au peuple d’avoir un impact sur la façon dont les lois qui vont régir leur quotidien. Il existe plein de manière de faire exister cet impact, avec plus ou moins de pertinence. Il existe donc divers degrés de démocratie.

Que peut-on faire comme constat aujourd’hui :

Parmi les points positifs, nous avons le droit de vote, et nous avons un accès à une information à peu près sans censure (on pourrait revenir sur ce point là, mais mettons).

La plupart des gens s’arrêtent à ce constat, et concluent à la démocratie. Parfait.

Mais il faut remettre les choses en perspective…

Oui, nous avons le droite de vote, mais… ?
Notre système de vote n’est que peu performant d’un point de vue représentatif. On peut le constater aisément en jetant un oeil à à peu près n’importe quelle assemblée d’élus, en terme d’âge, de classe sociale, de couleur de peau, de sexe…

On peut aussi s’interroger sur la pertinence d’un système à deux tours (qui régit nos élections nationales majeures), qui favorise grandement le vote utile et est très fortement influencé (et influençable) par les sondages et la présence de tel ou tel candidat dans les médias en général.

J’en viens justement à mon deuxième point : on sait par exemple que les sondages sont hautement influents dans les résultats (l’effet « hit parade »). C’est quelque chose qui a été scientifiquement étudié ou mis en évidence depuis longtemps, et qui est parfaitement connu des publicistes. A ce titre, les sondages pré électifs étaient il y a longtemps de ça interdits durant une certaine période avant le vote, puis seulement 24h avant maintenant, et d’ici quelques temps avec un peu de pragmatisme macronien là dessus, probablement autorisés le jour même jusqu’à la dernière minute.

Peut-on encore dire qu’on vote librement, en sachant pertinemment que l’effet « hit parade » aura un impact majeur sur le résultat ?

On pourrait poursuivre en soulevant par exemple que l’information est la clé d’un vote éclairé et fait en pleine conscience, et noter que dans le même temps la presse en général est concentrée entre les mains d’un petit groupe de millionnaires (milliardaires ?) aux intérêts politiques, on se doute, un peu différents de celui du commun des mortels.

Si on met tout ça en perspective avec les milieux dont sont issus la plupart des dirigeants au sommet de l’Etat, on peut au moins se poser la question d’un éventuel conflit d’intérêt. Non ?

Tout ça pour dire que si doutes sur l’intégrité de la démocratie actuelle il y a, des solutions existent aussi. Et existent en réalité depuis longtemps.

Vote par jugement majoritaire ? Garantie d’une indépendance des médias ? Interdiction des sondages ?

Ça parait vraiment difficile de croire que ces solutions pourtant simples ne soient jamais venues à l’esprit d’aucun dirigeant.
En réalité, je pense qu’ils savent tout ça. Et je pense qu’ils préfèrent largement un système moins représentatif et davantage manipulable comme celui dans lequel nous évoluons actuellement, qu’un autre qui porterait des valeurs réellement alternatives.

Le gouvernement se soucie-t-il de démocratie ? Bien sûr.

Il se soucie surtout de pouvoir en conserver le contrôle.

Avec le succès qu’on peut constater encore aujourd’hui.

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Une manière particulièrement intéressante est de développer des instruments de démocratie direct efficaces:

  • référendum:abolition par votation populaire d’une loi votée par le législatif.
  • initiative populaire: modification de la constitution proposée par le peuple et votée par le peuple.

Une démocratie où on ne vote (sauf rare exception) que pour élire n’est qu’une demi-démocratie à mon goût.

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Ce n’est pas qu’une question de voter ou de combien de fois on vote. On peut très bien avoir une démocratie sans aucun vote.

Si vote il y a, c’est sa qualité qui importe. Actuellement, on peut très bien laisser le peuple voter les 3/4 des lois, ça ne changerait pas tant que ça les choses. C’est facile de manipuler une masse avec les outils actuels (le premier d’entre eux étant la télévision). Et je suis à peu près persuadé qu’on parviendrait à faire passer la casse du code du travail comme le démantèlement des services publics de la même façon.

Non, le souci n’est vraiment pas (que) là.

Finalement, la démocratie, c’est un système (et même une façon de penser, et de faire) totalement complet, et qui implique son exercice, donc probablement une éducation à son exercice…

Ce qui n’est pas pratiqué aujourd’hui, loin s’en faut.

Effectivement la qualité du vote a une importance. Cela dit, pour un référendum la question est des plus simples « Accepter-vous le référendum contre la loi ‹ nom › du ‹ date › », pour l’initiative cela dépend entièrement du comité d’initiative.

La manipulation des masses a ses limites. En Suisse il n’est pas rare que le peuple votre contre l’avis de l’exécutif et contre l’avis du législatif. Et ce n’est pas faute de messages dans les médias.

Quelles limites ? Parce que pour l’instant, gavé à BFM TV, les gens en France ont fait des choix qu’ils regrettent…
Et, je ne connais pas la situation de ce point de vue en Suisse, mais en France, ce n’est pas exactement ça…

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Certes, c’est un peu mieux. Mais la consultation permanente du peuple, si elle est un peu meilleure en terme de représentativité, n’est pas efficace (lent et coûteux). Et puis on ne peut pas débattre pour se faire une idée du sujet à 30 millions. On en revient donc à l’accès à l’information comme outil, et aux problèmes évoqués un peu plus haut.

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La limite est que moins de 0.01% des citoyens (environ le gouvernement) perde la crédibilité sur un sujet au point de faire basculer un vote. Par exemple avec une participation purement arbitraire de 60%, cela permet à un peu plus de 30% des citoyens de désavouer le gouvernement. C’est un taux tout à fait réalisable, en particulier avec les moyens de communications tel que les réseaux sociaux.

Un aspect important de la votation populaire est qu’elle concerne un sujet (objet) précis. Ce n’est pas un ensemble de promesses plus ou moins réalistes, mais une modification assez clairement définie. Il est possible que le peuple regrette le vote sur un sujet. Ce n’est pas un problème de présenter à nouveau un sujet et que le peuple vote autrement.

En Suisse, la grande partie des citoyens n’ont aucune gêne à critiquer les travaux du gouvernement. Le gouvernement le sait très bien puisque dans tous les cas de figures c’est in fine le peuple qui décide. Du coup le rapport de force est différent. Le gouvernement se doit de présenter au peuple des solutions acceptables, sinon ça ne passe pas, et dans ce cas le gouvernement doit travailler pour produire une nouvelle solution. Tout ceci avec la pression supplémentaire que n’importe quel(le) citoyen(ne) peut n’importe quand rassembler un comité d’initiative populaire, récolter des signatures, et potentiellement faire voter directement par le peuple sa propre solution, sans aucune possibilité pour le gouvernent de l’empêcher ou de la modifier.

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Lent ? Les 3 instruments de démocraties directs en Suisse sont chacun adaptés à une vitesse de procédure:

  • Le référendum facultatif permet dans un délais de 100 jours à 50’000 citoyens de demander un vote populaire pour abroger une loi adoptée par le législatif. Sans réaction du peuple, le traitement correspond donc à la vitesse de traitement normal du législatif. En cas de votation populaire l’objet est agencé lors de la date de votation suivante, afin que les parties puissent en débattent publiquement. Comme il y a 4 dates de votation par année, cela fait généralement un délai de 5 à 9 mois (en comptant la récolte de signature et le hasard des dates). C’est pas énorme pour que le peuple puisse dire NON! à une loi qui ne lui plaît pas.

  • Le référendum obligatoire impose au gouvernement la tenue d’une votation populaire pour toute modification de la constitution. Là il n’y a pas le choix: agencement pour la date de votation suivante, donc 3 à 6 mois de délai (il n’y a pas de récolte de signature). Encore une fois, est-ce trop pour que le peuple se prononce ?

  • L’initiative populaire permet à comité de citoyens de 7 à 27 personnes de soumettre à une votation populaire une modification de la constitution, signée par 100’000 citoyens dans un délais de 18 mois. Là c’est un peu spécial car si le gouvernement ne peut pas modifier le texte de l’initiative il a un délai maximal de traitement de 4 ans pour proposer un contre-projet direct. C’est effectivement bien plus lent, mais comparé à quoi ? Le gouvernement tente parfois de faire passer des contre-projets indirects pour convaincre le comité de retirer l’initiative. Cela permet s’accélérer la procédure.

Coûteux ? Non, absolument pas. En regroupant les objets de votation lors de 4 dates annuelles, les coûts sont minimisés. En Suisse le coûts des votations sont estimés à l’équivalent de 15 EUR par citoyen et par année. Je précise que toutes les votations se font par correspondance: vous recevez directement chez vous tout le matériel de vote.

Et pourquoi donc chaque citoyen ne peut pas se fait sa propre idée ? Il le fait bien pour les élections. Sauf que lors d’un vote sur un objet vous ne jugez pas le show médiatique en boucle des médias, mais le texte exacte de la modification de la loi ou de la constitution que vous lisez tranquillement chez vous. Si vous faites confiance à un tiers sur le sujet en question, que ce soit un individu ou un parti, vous avez l’entière liberté de suivre leur recommandation, ou pas.

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C’est pas mal ça, en effet. Je sais pas si c’est adapté à un pays largement plus peuplé, mais c’est pas mal.

Ce n’est pas si simple à mon avis. Pour se faire une idée sur une loi, même si on ne la prend qu’elle toute seule, sur un sujet qu’on ne maitrise pas totalement, il faut bien se renseigner. Et je ne parle pas nécessairement de se renseigner en écoutant la parole d’un politique, mais se renseigner en croisant l’information et les points de vues.

Et on en revient donc à la possibilité d’avoir une information indépendante d’un petit groupe lui très orienté politiquement.

Critique classique. Aucun doute là dessus. La Suisse n’est pas le seul état disposant d’instruments de démocratie direct. Par exemple la Californie a une population de près de 40 millions de personnes et dispose aussi d’un référendum populaire. A noter que la Suisse dispose des outils de démocraties directs actuels depuis environ 150 ans et que sa populations a dans ce temps plus que triplée, sans que cela pose de problème, et ce malgré 4 langues nationales et que c’est une confédération de 26 cantons indépendants qui ont chacun leur propre constitution (un truc bien compliqué).

Note: ceux qui ont créé la constitution Suisse de 1848 se sont largement inspirés de l’architecture du système politique des États-Unis, auquel ils ont eu l’immense sagesse d’échanger le président par un conseil fédéral collégial composé de plusieurs partis. Ce n’est pas un bricolage hasardeux. Si ça tient depuis aussi longtemps c’est aussi parce que ça a résisté à plusieurs tentatives d’attaques politiques.

Exacte, et ça chacun peut le faire avec plus ou moins de motivation sur chacun des sujets. Le résultat du tout est l’avis du peuple. Ne doutez pas que l’avis du peuple peut être critique. Nombre de gouvernements ne cherchent pas exactement à ce que vous soyez d’accord, mais que vous continuez à bosser. Les frustrations sont énormes. Avec une votation populaire vous décidez si vous êtes d’accord ou pas. Cela diminue les frustrations.

Oui, sauf qu’il va vraisemblablement pas en avoir qu’un seul, mais plusieurs. C’est là que les débats deviennent intéressants: car chaque sujet de votation populaire est un enjeu important pour certains.

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Un autre point clé du système Suisse est qu’en aucun cas ces référendums ne sont à l’initiative des gouvernants contrairement à la France où seul le Président peut lancer un référendum. (je ne parle pas du référendum d’initiative partagé qui a été construit pour ne jamais avoir lieu et qui de toute façon est à initiative des parlementaires)
C’est toute la différence entre un système au service des citoyens et un outil purement plébiscitaire au service du pouvoir en place.

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C’est vrai pour le référendum facultatif et pour l’initiative populaire, mais pas pour le référendum obligatoire qui est déclenché par des travaux du gouvernement lorsqu’il propose au peuple une modification de la constitution. Le point important ici est que c’est vraiment obligatoire, et non pas à la discrétion d’un gouvernement que veux un plébiscite pour conforter sa crédibilité.

Pour résumer, les votations sont: soit à la discrétion du peuple; soit obligatoires pour le gouvernement.

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