Médias et démocratie

Natasha Polony et Elise Lucet qui parlent de leur métier de journaliste

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En réalité au niveau du contrôle des grands groupes effectivement il faut faire attention, mais dans les deux sens. C’est à dire qu’un journal ne contrôle évidemment pas le travail de chaque journaliste et chaque article au mot près, mais il y a un contrôle qui en réalité est diffus.

Il se fait tout d’abord par une autocensure, qui n’est pas forcément volontaire de la part du journaliste qui voudrait « cacher des informations ». Prenons l’exemple récent de la condamnation de Serge Dassault : difficile d’imaginer ce propriétaire dicter directement au rédac chef du Figaro quoi écrire dans l’article. Pourtant, le journaliste qui écrit l’article sait que S. Dassault est son ‹ patron › et il va de lui-même mettre en avant les éléments en faveur de la défense. C’est presque involontaire, donc dire que les médias sont contrôlés par peu de personnes ne veut surtout pas dire que les journalistes feraient mal leur job, c’est souvent involontaire voire malgré eux.
Une autre forme de ce contrôle diffus, involontaire, ce sont les sources. Si un journaliste travaille dans une rédaction A, il n’aura pas les mêmes sources à disposition que s’il travaille dans une rédaction B. Ces sources sont mises à disposition en grande partie par le média lui-même, et le journaliste sera ainsi orienté via ces sources, sans pour autant le faire volontairement ni qu’il n’y ai une quelconque négligence de sa part. Evidemment, c’est là encore difficile à mesurer.

Quant au sens critique, c’est selon moi un autre débat. @c.viallis Tu dis par exemple que seuls Mediapart, Elise Lucet et les journaux indépendants font leur boulot correctement. Or, pour bon nombre de personnes, ceux que tu as cité sont considérés comme des « gauchos » ou autres adjectifs pas vraiment valorisant. Tu aura beau écrire un article parfaitement détaillé, documenté, avec des sources fiables, il y aura toujours des gens pour remettre cela en cause car ça ne va pas dans leur courant de pensée.

Et pour finir, évidemment les journaux sont heurtés au problème du financement. Ils doivent vendre et tirent une grande partie de leurs revenus de la publicité. Cette première contrainte favorise les articles qui fonctionnent sur les sentiments, des titres vendeurs aguicheurs. Quant à la deuxième, elle favorise la position des grandes marques qui peuvent se payer ces publicités, puisque froisser ses annonceurs c’est mettre la clé sous la porte pour de nombreux journaux.

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« gauchos »??? oui bin c’est devenu une insulte d’être de gauche avec pleins de variantes, il n’y a pas d’insultes pour ceux qui sont à droite. On va pas s’arrêter à chaque insultes. On est jugés tout le temps quoi qu’on fasse.

Ceux que j’ai cité qui font leur travail correctement c’est qu’ils prennent le temps de le faire avec Cash investigation où ils font 1 an d’enquête. Ils prennent le temps d’analyser et traiter l’information.Qui d’autre fait ça maintenant?

Les autres journaliste/pigistes/stagiaires sous payés n’ont pas le temps de bien faire leur travail et de traiter une info correctement.

Pour répondre à ce qui a été dit en tout premier, les médias, selon moi, jouent un rôle déterminant dans la société.
Peut-être que ça le sera de moins en moins avec Internet (quoique les gens vont pouvoir des fake-news sans s’en rendre compte). En tout cas j’avais envie de partager cette vidéo avec toi qui résume assez ce que je pense de tout ça :

En la regardant je trouve qu’il y va fort sur le sujet mais malheureusement je pense qu’au fond il a raison…

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Oui @jguignie on ne peut pas résumer la situation qu’à cela (le fait que les grands groupes détiennent la quasi totalité des médias). Mais même quand certains veulent faire du bon boulot (Elise Lucet, etc…) ils ont parfois des bâtons dans les roues.

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Je disais ça pour dire qu’une information jugée comme objective et indépendante par certains peut au contraire être qualifiée de subjective et soumise (à une idéologie notamment) par d’autres, et c’est ce qui complique aussi le débat.

@NeXiuS Une des difficultés quand on parle de « grands groupes » et de « contrôle des médias » c’est évidemment de ne pas tomber dans la théorie du complot, et évidemment qu’il y a des nuances. Il n’y a pas d’assassinats de journalistes ni de véritable propagande, mais plein de petits éléments de contrôle.

Je suis d’accord avec toi,dire information objective est très difficile à dire: et je vais même plus loin, lorsqu’elle est politique elle sera toujours subjective.[quote=« jguignie, post:13, topic:2568 »]
chacun de ces points de vue est convaincu d’avoir raison (ce n’est pas seulement par intérêt)
[/quote]
Par contre, indépendant des pouvoirs peut être possible.

C’est d’ailleurs pourquoi l’approche de DATAGUEULE qui se donne pour objectif des bases les faits, n’est pas du tout suivi par certains: ils ont d’autres considérations qui ne sont pas présentés par Datagueule.
En revanche, ce que l’on peut dire c’est que l’on peut orienter (surtout pour l’aspect économique) les faits dans le sens du plus grand nombre (celle-ci sera subjective/ orienté malgré tout), des citoyens: et c’est donner cette information que devrait permettre la démocratie.
J’ajouterai pour plus de précisions cela: On pourra toujours révéler certains mécanismes sociaux (comme la construction des inégalités, le chômage de masse, etc…). Le problème vient à savoir quelle est la méthode pour réduire les problèmes induits par ces mécanismes: Et tout le monde prendra en compte seulement un certains nombre de mécanisme (par exemple: pour réduire le chômage on peut permettre une plus grande flexibilité aux entreprises (ça marche), mais ça ne prends pas en compte les problèmes que ça induit (vie difficile car travail en alternance, petits boulots…).

Malheureusement les gens qui ont les moyens de faire ces analyses n’ont qu’une très faible présence médiatique classique (cash est le seul reportage sur les heures importantes.). Et lorsqu’ils arrivent à le faire, ils sont menacés, même avec le service publique qui un directeur des chaînes nommé par le président.

C’est simple: Ceux qui ont le pouvoir veulent le garder. Sauf qu’actuellement, les Etats ont beaucoup moins de pouvoirs sur l’économie et la finance . Et ceux là veulent le garder et même augmenter ce pouvoir.
Deux causes: Certains citoyens (de tous pays d’ailleurs) ont élu des hommes et femmes politiques qui ont détruit les pouvoirs de l’Etat sur l’économie. Et le pouvoir financier et économique a fait du chantage économique et financier à certains autres hommes politiques: si vous enlevez du pouvoir aux entreprises, on délocalise et aucun homme politique veut plus de chômage. Resultat: en 1983 Mitterand commence une politique libérale après avoir tenté la gauche.

Les mentalités changent, espérons que le film de datagueule en libère quelques uns!

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Nous sommes donc bien d’accord! :slight_smile: Mais indépendant des pouvoirs ne signifie pas uniquement les pouvoirs politiques et c’est là qu’il peut parfois y avoir confusion, mais comme tu l’as dis aussi les pouvoirs économiques.

L’ensemble du débat est très intéressant et je pense aussi que la place des médias est prépondérantes dans les processus démocratique. Car les médias sont le filtre entre les actions politiques de nos dirigeants et le retour d’information qu’obtient la population sur ces actions politiques. Chaque action de leur part influence l’opinion de ceux qui les consommes. J’entends par là que la quasi totalité de la population se nourrit des médias, il en découle directement leur importance et leur puissance. Mais au delà des prises de positions de certain média, ou de certain journaliste, il y a quelque chose de plus subtil, je dirais même de plus malsain dans la manière qu’ils ont de traiter l’information. Car c’est à l’aide de vocabulaire, de silence, et de petite chose répétées des centaines de fois qui fini par influencer sur la manière de penser de la population entière. Pour cela je vous conseil de regarder le film documentaire « Les nouveaux chiens de garde » sortie en 2012. Je ne l’ai pas trouvé en libre accès sur internet, mais plusieurs extraits sont disponibles sur YouTube. Ce film est vraiment intéressant et pointe du doigt les médias, mais aussi la complexité des relations entre dirigeants des médias, dirigeants politiques, industriels… Au final, la conclusion que j’en tire, c’est que les médias parfaits sont difficilement réalisables, je dirai utopistes. Bien que les médias actuels peuvent être plus honnêtes, plus détachés des propos qu’ils traitent. Cependant pour réduire les biais que les médias peuvent avoir sur l’opinion publique une solution me parait évidente : la curiosité. Donner aux jeunes, la curiosité de comprendre le monde qui les entoure, les encourager à se poser des questions, à se cultiver. Afin de leur donner les outils pour avoir du recul, pour pouvoir analyser ce qu’ils reçoivent des médias. J’entends par là revoir complètement notre système et mode éducatif, pour ne pas fournir une école de la république, mais des écoles de la république. Ne plus donner un seul et unique chemin de penser, mais donner les outils d’analyses, de réflexion et de curiosité nécessaire pour que chacun puisse avoir le recul suffisant et se créer son propre opinion.

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Voici la bande annonce du film, pour vous mettre l’eau à la bouche.

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C’est drôle, je croyais quelqu’un l’avait déjà cité! Et bien-sûr ce documentaire est indispensable pour avoir une vue pour comprendre comment la pluralité des opinions a été détruite (sauf exceptions) et la proximité de nombreux journalistes avec les politiques.
On peut le trouver assez facilement en streaming normalement (streamay, bizstreaming, etc…)

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Il y a deux posts qui se ressemblent, celui-ci et

Pour ne pas doublonner, j’imagine que les liens vidéos, ouvrages etc… doivent surtout être mis dans l’autre post.

Bref, j’avais une question particulière, après le visionnage des Nouveaux chiens de garde , qui fait la critique des médias privées & d’une pensée uniforme :

Comment jugez vous, en général, le paysage médiatique public français ? (télé & radio)
Que faut-il en penser ?

Je n’ai pas de réponses et d’avis spécifiques sur cette question, j’attends surtout vos éclairages.

Merci!

La question que tu poses est extrêmement large!
Car l’on peut aussi considérer l’aspect loisir de la télévision ou de la radio, qui est largement plus important en quantité que le côté information, et réflexion. Cette aspect loisir reproduit le plus souvent les codes et stéréotype d’une époque: gagner une voiture, de l’argent…
Mon point de vue sur la situation actuelle du côté information, c’est que le débat d’idée télévisuelle est très réduit. La plupart du temps, les idées qui sont décrites comme non-conventionnelles sont faiblement présentées, sous un aspect peu valorisant. Elles restent malgré tout visibles.

Pour ce qui est de l’indépendance, les journalistes eux-même se défendent de toute prise de positions dépendantes.
Un article très intéressant du monde montre la pensée dans ce milieu:

Une phrase très intéressante dans cet article:
« L’information prime toujours. Ce qui ne nous empêche évidemment pas de défendre un certain nombre de valeurs, telles que la défense des libertés publiques, la justice sociale ou l’avènement d’un projet européen ambitieux – des valeurs en opposition avec ce que défendent Marine Le Pen et le Front national. »

Justement ces valeurs sont celles partagées par une classe politique particulière, d’où cette fuite en avant vers le non-débat. Mais dire que la pensée est uniforme, c’est pas correcte. La critique des médias reste présente même à la télé!

Enfin, internet a ouvert un formidable terrain pour les idées non-retenus par les médias de masses: d’où la popularité de personnalité comme Alain Soral ou Lordon sur internet.

Merci de ta réponse, c’est sur qu’au niveau des médias privés, l’indépendance prônée n’est pas toujours très présente…

Ma question portait plus sur le service public : France 2, France 3, franceinfo:, France Inter etc…
Est ce que les critiques générales sur les médias français portent également sur les chaines publiques ?
Ou est-ce que l’information est en général très fiable et neutre ?

Par exemple, les critiques faites à Pujadas, ou les relations entre la gouvernance France télé et les politiques …

Le problème vient du mot neutre: qu’est ce qu’une information neutre?
Mon point de vue est le suivant: il n’y a pas d’information neutre ou objective et c’est exactement ce qui fait au croire au Monde qu’ils ne sont pas un journal d’opinion. Un journaliste aura toujours des valeurs qui ressortiront dans sa façon d’écrire, de présenter, de choisir un sujet plutôt qu’un autre,etc … C’était l’un des messages de la discussion. Je peux parler d’une manifestation en parlant plus du sujet contesté, ou plus des casseurs, ou plus sur les effets des blocages (retard de trains). Ce n’est donc pas la neutralité qu’il faut rechercher, mais l’expression de multiples points de vue.

Le service public donnera presque toujours des informations considérées comme vrai, ou vérifié. Pour la pluralité des points de vue, elle reste à démontrer. Surtout que l’information n’est donnée souvent sans analyse!

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Je suis d’accord avec l’article. Il manque toutefois d’analyser que plus une génération est jeune moins elle regarde la télévision ou lit les journaux. J’ai fait la même transition avec mes enfants: la TV c’est just un moyen d’enregistrer quelques films inédits ou une des rares émissions intéressantes de façon à couper la publicité insupportable. Dès qu’une information manque, c’est internet qui fournit le plus de sources intéressantes. L’orientation de l’information est donc devenu bien plus compliquée pour ceux qui veulent contrôler les médias, et je pense que ce n’est qu’un début. Ce projet #Datagueule s’inscrit bien dans ce contexte et j’espère qu’en plus d’informer, il proposera aussi des solutions.

Je crois que la première question à se poser avant tout à propos des médias est: Quel est l’influence des médias sur les résultats d’une élection, et comment la mesurer ?

En d’autres termes, est-ce que gagner une élection consiste à maximiser sa visibilité ?
Si on découvre une corrélation forte entre le temps d’antenne et le score aux élection (ce qui semble être le cas), alors la question de l’indépendance des médias, ainsi que celle de la représentativité des médias, deviennent critique, et un état des lieux serait le bienvenue.

On pourra aussi s’étendre sur l’évolution des nouvelles plateformes médiatiques (Youtube, etc) et se poser les mêmes questions vis-à-vis d’elles.

Avez-vous des éléments de réponses à partager sur ces questions là ?

  • Je n’aime pas trop l’article de Mediapart, enfin l’analyse qu’ils tirent de leurs calculs mathématiques. Oui il y a corrélation au sens mathématique, mais je pense qu’il y a trop de facteurs pour donner une réponse précise, comme eux l’affirment.

  • Les Décodeurs du Monde m’énervent souvent, mais l’article ci-dessous est de qualité.
    Beaucoup de graphiques un peu dans tous les sens, mais le ton est neutre.

Je le cite surtout pour la base de données utilisée, qui est disponible tout en bas de l’article (surement disponible sur un site officiel, c’est de l’Open Data).

http://www.lemonde.fr/les-decodeurs/visuel/2017/05/26/presidentielle-2017-visualisez-80-jours-de-temps-de-parole_5134202_4355770.html

CI-dessous, les résultats cumulés (en secondes) du 1er Février au 21 Avril.
Par exemple, Hamon est haut en temps de parole, il était bas dans les résultats…

Mais en tout cas :

Pour moi ce sont deux questions complétement différentes : maximiser sa visibilité peut être bénéfique ou non à un candidat (coucou Fillon), donc ce n’est pas, selon moi, primordial, par contre l’influence des médias est IMMENSE.

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Vous avez très certainement raison de prendre vos distances vis-à-vis de mediapart et des décodeurs du monde.

En revanche, après avoir lu l’article des décodeurs, je ne crois pas qu’on puisse en tirer des conclusions si vite, car il n’y a aucune différentiation entre les différents types de temps de parole. Le passage dans la matinale de France 2 n’ayant pas la même valeur qu’être invité du 20h de la même chaîne, et encore, même dans les jours de la semaine on pourrait éventuellement constater des différences drastiques d’audimat. Pour vraiment comparer, il faudrait rapporter les temps de paroles à l’audimat, ou à défaut (car certains zapperont immédiatement en voyant parler Mme Le Pen), à l’audimat moyen de la chaîne sur ce créneau horaire / cette émission.

En encore, on ne rentre pas dans l’analyse même de l’audimat, la part belle du gateau étant probablement le créneau ou le plus d’indécis regardent ou écoutent.

La conclusion parait juste en revanche: Mr Hamon a probablement disposé de bien plus de temps de parole qu’il n’en fallait pour justifier un meilleur score que le sien. Il y a donc d’autres facteurs qui rentrent en jeu (bien joué sherlock: qui est le parti sortant, quel est le message associé à la visibilité, quels sont les résultats des sondages, l’objectif affiché du candidat, etc).

La 1e question allait peut-être un peu plus loin, dans le sens ou l’influence des médias ne s’expriment pas forcément uniquement par la quantité de visibilité apportée, mais par la nature même de cette visibilité: les candidats qui passent leur temps à se défendre des attaques de journalistes ne jouissent peut-être pas de la même portée que ceux qui peuvent exposer tranquillement leur programme sans répondre aux questions clés de celui-ci.

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