La dictature invisible du numérique

Je partage un livre de je viens de terminer : L’homme Nu de Marc Dugain et Christophe Labbé.

C’est un livre qui traite des BigData et de la dictature du numérique. On s’éloigne de la démocratie, mais il me semble important de prendre conscience que la démocratie de demain passera aussi par l’outil informatique. Elle s’en servira mais en sera aussi dépendante. Que ce soit par le partage de données entre les citoyens, par des débats ou encore par des votes en lignes. Le site sur lequel je suis en train d’écrire et vous de lire en fait partie.

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Bonsoir @VincentB,

il me semble que tu fais très bien de soulever ce sujet, le numérique fait office d’élément centrale dans la communication des candidats, de leurs idées… Mais au-delà de cela le pouvoir des GAFAs est aussi à remettre en question. Les CGU ne font-ils pas offices de lois auxquelles on accepte - trop souvent sans les lire - de se soumettre quand bien même le respect de nos droits à des communications privées soient bafoués. Est-on réellement capable de dire qui respecte quelle loi sur internet puisqu’il semble s’agir d’une chasse permanente pour les autorités ? On a là affaire à des échelles démentielles et on est en droit de se demander si un état peut encore défier les superpuissances que sont les GAFAs, nous y sommes tous soumis pour faire partit d’une société qui se forge autour sans prendre le temps de se poser la question – excusez-moi si je suis ridicule, je sais que l’idée ne fait pas l’unanimité dans un monde accablé d’inégalités – d’un droit fondamental (que je pense inévitable) à l’accès à internet.

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Bonsoir,

Effectivement, ça parait impossible aujourd’hui pour quiconque (un état ou un particulier) de se battre, ou juste de se défendre contre les GAFAs. Par contre on peu éveiller la population sur ce sujet. Faire comprendre aux gens le danger qu’elles représentent pour permettrent à tous de se protéger soi-même et de trouver des alternatives.
C’est aussi le cas pour la démocratie. Un des enjeux du documentaire, je pense, sera d’abord de faire prendre conscience aux gens de la nature de notre système qui n’en ai qu’un parmi tant d’autres pour qu’ils puissent éventuellement en concevoir un nouveau dans le futur. L’important étant d’informer.

Pour revenir sur les GAFAs, si on souhaite se protéger, il ne faut pas pour autant tomber dans l’excès inverse de l’auto-censure. Dans plusieurs interviews Edward Snowden disait au sujet des citoyens américains qu’ils ne devaient pas changer leurs habitudes même en sachant que leurs activités étaient observée et enregistrées par la NSA via des programmes comme PRISM. C’est un cas particulier mais il est très proche du problème soulevé par les BigData. Sur ce point je pense qu’il a raison. Changer nos habitudes face à un modèle qui ne nous plait pas, c’est déja reconnaitre ce modèle et lui donner de la légitimité. Réaliser ça c’est bien, mais ça ne nous fait pas vraiment avancer.

Si la démocratie de demain doit se mêler au numérique, alors il est presque certain que le numérique aussi doit changer. Le système des BigData poussé à l’extrème permetterait, dans un futur lointain, de connaitre en théorie l’opinion, la façon de penser de toute une population à un instant donné. Ainsi il n’y aurait plus besoin de voter. Et une élection serait totalement légitime puisqu’elle serait conforme à la « véritable » opinion publique, il n’y aurait pas de vote utile ou d’abstention. Chaque individu donnerait son avis, sans vraiment le donner (c’est un point soulévé dans le livre).

Bien sûr c’est dans la théorie et ce serait dans les faits bien plus dangereux. Premièrement parce que sans contrôle véritable de l’opinion d’un « votant », un ordinnateur pourrait difficilement faire la différence entre une opinion réfléchie et un avis sur un coup de tête. Ensuite, l’opinion des gens est façonnée par ce qu’ils voient du monde. Or, c’est ce qu’ont remarqué Marc Dugain et Christophe Labbé, les données récoltées sur un individu sont utilisées par les services de communication et de publicité pour cibler une certaine part de la population. Cette part croule donc sous des messages et des invitations en rapport avec ces agences. Leur vision de l’extérieur se restreint alors à ces seules publicités. L’outils internet qui était symbol d’ouverture d’esprit se referme sur eux. Leurs perceptions des choses, leurs opinions peuvent être orientées.

Bon, continuer là-dessus c’est spoiler le livre donc je m’arrête. En bref, une forme convenable de démocratie qui se mêlerait à l’outil informatique devra garantir une certaine authenticité de la parole publique. Les participants devront toujours être des acteurs au premier sens du terme. Une telle démocratie de partira pas du net vers les citoyen mais des citoyens vers le net.

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Sur un sujet similaire, on peut également parler de Code and Other Laws of Cyberspace : (Code and Other Laws of Cyberspace - Wikipedia) dont je parle ici : Code is Law

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En effets le numérique risque de devenir le medium unique de la démocratie. L’échange interpersonnel, essentiel à la compréhension de l’autre, à l’empathie, reste cependant très limité par internet. L’intelligence collective a besoin, pour émerger, d’intelligence interpersonnelle. Ceux qui ont participé à un quelconque atelier démocratique le comprennent. Cela soulève de nombreuses questions. Quels opportunités/risques les « civic-tech » représentent-elles pour la démocratie ? Comment penser un équilibre intelligent, fonctionnel et inclusif entre l’espace démocratique virtuel et l’espace démocratique physique ?

Justement, il y a un équilibre à penser et à réfléchir, parce que compte-tenu des ressources que nous possédons sur terre pour accéder au numérique (je rappelle que le tantale et autres minerais qui composent nos machins sont très difficiles à obtenir et la tendance est plus à l’épuisement qu’à autre chose…), il est possible que les plus jeunes générations voient l’extinction du numérique ou bien une façon différente de gérer la question du numérique.

Du coup, le numérique ne permettra pas de tout gérer… Ou alors, il faudra le décider très en amont pour recycler mieux et bien les appareils déjà utilisés…

J’ai moi aussi lu « l’homme nu » et je le conseil à tous.

L’outil numérique est, je le pense, la source de notre salut. Mais il est tellement récent que nous n’avons pas le recul nécessaire pour pouvoir l’analyser correctement.

Veritasium, un youtuber, a fait une très belle vidéo sur le problème (Post-Truth: Why Facts Don't Matter Anymore - YouTube) pour ceux qui ne parlent pas anglais il dit en gros qu’au début d’internet il s’attendais à des choses merveilleuses, que tout le monde allait pouvoir partager ses opinions avec tout le monde. Mais en réalité ce qui s’est produit est un replis des communautés sur elles même. Et ça a même permis de renforcer des communautés qui étaient avant isolées, noyées dans les autres (pour le meilleur et pour le pire).

Nous arrivons à peine à voir ce qu’on a foiré avec internet que nous devons déjà gérer de nouvelles révolutions (tel que l’IA et la réalité virtuelle).

Néanmoins j’ai trouvé le livre un peu dramatique sur plusieurs points. On est pas dans une spirale dont on ne peut sortir. On critique souvent le GAFA mais ils essayent de prendre des initiatives pour faire éclater ces bulles communautaires. Bon pas par charité, mais parce que ça nuit à leurs affaire mais au moins ils le font.

Il y a aussi une vraie opportunité de récupération citoyenne. Le monde de l’informatique reste globalement très ouvert. La plupart des algorithme novateurs sont disponibles gratuitements et tout le monde peut les utiliser pour faire des choses. Une éducation numérique, ou en tous cas une éducation statistique qui permettra à tous de comprendre comment les données peuvent être manipulées pour le bien comme pour le mal me semble indispensable pour le futur démocratique.

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C’est d’ailleurs notre projet http://responsibility.digital, pour rendre visible le non visible des CGU !
Et nous allons lancer un Hackaton UX design pour ce projet de service web, les 6 et 7 octobre, sur Genève !
A suivre: http://do-camp.org
@VincentB @remicloarec

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Oui et non, en 2011, Messenger de Facebook était ouvert aux outils tiers, avec des API permettant de communiquer via des outils externes. Cela a été clôturé ! Il y a une tendance actuelle a « capturer » une communauté pour devenir l’acteur incontournable… Quand des outils numériques initialement distribués et open, comme SMTP (emails), sur un réseau distribué en maillage, concept de l’Internet résilient, est en train de (re)devenir un réseau en étoile, à travers des services captifs, même si distribués: Un seul domaine, un point de passage obligé: WhatsApp ou Facebook !

Notre groupe de réflexion sur Genève planche doucement, car bénévolement, sur ces questionnements. http://TG-CSR.org

Je suis d’accord. Quand je parlais de faire éclater les bulles communautaires je parlais plutôt de faire en sorte que les personnes qui utilisent les plateformes ne soient pas tout le temps exposés aux même idéologies.

Sinon d’un point de vue utilisateur c’est clair qu’ils font tout pour que leur plateforme seule soit utilisée et utilisable :frowning:

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