En suisse - la démocratie semi-directe, mais pas seulement

Bonjour,
J’aimerai avoir à parler d’un cas pratique entre les intérêts des citoyens et la légalité à travers le monde, et donc ce qu’ont fait les citoyens face à ça.
Ce cas pratique en Suisse est le secret bancaire:

Si je lis l’article wikipedia, il a fallu attendre la crise de 2008,et que de nombreux Etats face pression sur la Suisse pour que le secret bancaire soit levé, pour que les valeurs illégales reviennent à la légalité.
Donc ma question est simple: est-ce qu’il y a eu, avant ou après la crise, des propositions citoyennes sur ce champ?

En débat de fond que je pose, c’est connaître un peu mieux les liens entre souveraineté et intérêts du même peuple. Ou si c’est plus le gouvernement fédéral qui a maintenu ce système.

Selon les listes des initiatives populaires ci-dessous, 2 ont concernés le secret bancaire:
https://www.admin.ch/ch/f/pore/vi/vis_2_2_5_1.html?lang=fr

  1. initiative populaire « contre l’abus du secret bancaire et de la puissance des banques »
  2. initiative populaire « Défendons la Suisse, inscrivons le secret bancaire dans la Constitution fédérale »

La première a été votée et refusée par le peuple et les cantons. Elle fait l’objet d’un article Wikipedia:

La page du traitement officiel de cette initiative est ici:
https://www.admin.ch/ch/f/pore/vi/vis133.html

La seconde a échoué à réunir 100’000 signatures en 18 mois:
https://www.admin.ch/ch/f/pore/vi/vis369.html


Concernant le sujet précis du secret bancaire, je pense que le peuple n’a pas effectué vraiment d’action politique comparativement aux actions du conseil fédéral et du parlement. Une possible explication est que le secret bancaire était pendant très longtemps plutôt présenté à la population comme une protection utile que comme un moyen de fraude. Quand les abus trop massifs ont été rendus publique, les banques et le gouvernement n’ont pas tardé à réagir pour trouver des solutions, donc le peuple est resté politiquement passif en attendant les résultats des travaux du gouvernement. Les conflits dans les débats ont plutôt été entre les partis politiques au parlement, et les citoyens qui avaient un avis tranché sur la question leurs ont pragmatiquement fait confiance.

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@jguignie Le secret bancaire est encore un sujet chaud:

Cet article semble confirmer mes observations: l’essentiel des débats sur ce sujet sont au parlement.

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Je partage ici le lien sur ce site que je trouve très bien fait pour expliquer le système politique Suisse:
https://www.ch.ch/fr/democratie/

A propos des instruments de démocratie directe:

Un sujet qui sera je l’espère abordé sous une forme ou une autre dans le film #Datagueuele.

Petite actualité qui démontre comment un instrument de démocratie directe (ici l’initiative populaire) permet de faire directement voter le peuple sur un objet sans délibération parlementaire:

Le texte complet de l’initiative:

https://www.admin.ch/ch/f/pore/vi/vis466t.html

Documents officiels de l’initiative:

https://www.admin.ch/ch/f/pore/vi/vis466.html

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Un petit exemple de votations habituelles pour passer le temps…

thug life :sunglasses:

La qualité des informations lors d’une votation est importante, comme ça été relevé plusieurs fois sur cet agora. Voici un exemple de tentative d’amélioration:

Le président de la Commission européenne tente un exercice de style pour faire passer la pilule à un peuple souverain, quelque chose qu’il ne comprend visiblement pas. Lu dans la presse de ce jour:

Bruxelles tient [à l’accord cadre] pour garantir l’accès au marché européen via une reprise plus systématique par la Suisse du droit de l’UE.

Jean-Claude Juncker a profité [de sa visite en Suisse] pour critiquer au passage le vocabulaire. Le terme d’accord cadre est horrible, il s’agit en fait «d’une sorte d’un traité d’amitié entre la Suisse et l’UE».

Pourquoi Junker ne demande pas à la Chine de reprendre automatiquement le droit Européen ?

https://fr.express.live/2017/01/18/investissements-chinois-europe-76/

Je serai bien curieux de découvrir la position des citoyens européens sur ce type de question.

Comme chaque année, le parlement suisse procède à l’élection d’un nouveau président et d’un nouveau vice-président du conseil fédéral suisse. Le sécance, y compris les votations et les discours, a été bouclé en 50 minutes. Il n’y a aucune campagne présidentielle.

https://www.parlament.ch/fr/ratsbetrieb/amtliches-bulletin/amtliches-bulletin-die-verhandlungen?SubjectId=41806

J’encourage à écouter le discour du nouveau président, Alain Berset, qui exprime assez bien à mon avis les fondements de la politiques suisse: continuité, collégialité, pragmatisme, et compromis. Je pense sincèrement que la structures des institutions politiques suisses et les instruments de démocratie directe contribuent énormément à cette culture particulière de la démocratie.

merci pour ce complément!

je repensais aux initiatives et aux referendum :slight_smile:
que ce passe-t-il quand ils y en a beaucoup qui atteignent le seuil pour déclencher des votations? Sont-elles simplement mises à l’agenda des votations dans leur ordre de dépôt? où y a-t-il une priorité à celles qui ont le plus de signatures?

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Pas de quoi :slight_smile: Curieusement, un exemple de gouvernement collégiale n’attire beaucoup d’attention sur cet agora.

Chaque initiative et chaque référendum est traité séparément. Le conseil fédéral et/ou le parlement influencent sur la durée de traitement, mais il y a une durée maximal entre la fin de la récolte des signatures (dépôt à la chancellerie fédérale) et le moment de la votation populaire. Les paragraphes qui définissent la durée de traitement sont un peu éparses dans la constitution fédérale, mais la page suivante les rappels: Délais ordinaires de traitement

Cf. la loi sur le Parlament (171.10) art. 97, art. 100, art. 105 et art. 106 ainsi que la loi sur les droits politiques (161.1) art. 75a.
https://www.admin.ch/opc/fr/classified-compilation/20010664/index.html#a97
https://www.admin.ch/opc/fr/classified-compilation/20010664/index.html#a100
https://www.admin.ch/opc/fr/classified-compilation/20010664/index.html#a105
https://www.admin.ch/opc/fr/classified-compilation/20010664/index.html#a106
https://www.admin.ch/opc/fr/classified-compilation/19760323/index.html#a75a

La date du dépôt de l’initiative (fin des récoltes des signatures), et donc la date de début de la récolte de signature 18 mois plus tôt, définit les dates maximales de traitement selon les paragraphes ci-dessus. Il y a donc quelque chose de l’ordre du premier arrivé, premier traité. La constitution ne prévoit pas de priorité. Ca c’est pour la théorie.

En pratique, le gouvernement et/ou le parlement peut avoir intérêt à aller plus ou moins vite sur un sujet en fonction de débats ou de négociations relatives en cours. Le cas typique est lorsque le gouvernement veut proposer un contre-projet à une initiative. Un autre exemple est quand le parlement parvient à légiférer sur une loi pendant la durée de traitement d’une initiative au point de changer sa substance. Il arrive même que le comité des initiants soit alors satisfait au point de retirer son initiative.

Par commodité, les votations populaires sont groupées sur environ 3 ou 4 dates par année, ce qui influence la durée de traitement totale. Donc à une date de votation donnée, les différents objets en votation peuvent avoir été déposés à des dates bien différentes. Il y a toutefois des limites qui garantissent un temps de traitement maximal. Historiquement, certaines de ses limites ont été introduites tardivement suite aux frustrations de certains comités d’initiative.

La situation avec trop d’initiative et/ou de référendums ne s’est pas encore produite, mais fait parfois l’objet d’un interpellation parlementaire. La solution la plus pragmatique serait d’augmenter le nombre signatures nécessaires, ce qui fait justement parfois l’objet d’un débat. Historiquement le nombre de signatures est passée de 50’000 à 100’000 lorsque le nombre de votants a doublé après l’acceptation du suffrage féminin. Il est resté stable depuis, malgré l’augmentation de la population. Le consensus actuel est qu’une limite basse permet un plus grand accès à l’expression politique, ce qui est vu positivement tant que les travaux de traitement représentent une charge raisonnable pour le gouvernement et le parlement.

merci encore pour ces précisions.

Pour la dernière vidéo, c’est difficile d’imaginer un équivalent français, ça ressemble plus à un parlement européen qui élit un président que des électeurs qui élisent un président. Peut-être ma comparaison est abusive.

Je vois une autre limite dans l’imaginaire français, c’est que le peuple suisse s’est lui-même appelé à voter prêt de 600 fois pour des initiatives ou des referendum depuis 1848… en france, combien de fois le peuple s’est-il appelé lui-même à voter? …

Officiellement, zéro fois.

Je pense que la différence principale est la collégialité de l’exécutif composé de multiples partis. C’est une forme d’organisation plus formelle pour rechercher le compromis, mais le fait qu’ailleur des présidents doivent négocier pour obtenir une majorité ou former une coalition fait penser que derrière la formule se cache un besoin plus universel de compromis. Les situation de cohabitation dans le gouvernement Français va un peu dans cette direction.

Le parlement Suisse (législatif) élit les 7 conseillers fédéraux (exécutif) tout les 4 ans et élit parmis eux un président et un vice-président toutes les années. Le président du conseil fédéral Suisse n’a aucun pouvoir en plus des 6 autres conseillers fédéraux (à part de déclarer l’ouverture et la clôture des séances du conseil fédéral). Il sert de représentant de la Suisse dans les situations ou le protocole en exige un, en particulier dans le contexte international.

Le parlement EU (législatif) approuve le mandat pour 5 ans d’un président de la commission EU (exécutif) nommé par le conseil EU. Le président de la commission EU est responsable de la liste des commissaires qui elle-même suit des règles et une procédure plus compliquée encore. La commission EU est censé travailler en collégialité.

Il y a des similitudes sur quelques points, mais aussi pas mal de différences. La différence la plus fondamental ne saute pas directement aux yeux: le gouvernement Suisse est un gouvernement fédéral avec un fort contrôle direct du peuple, alors que le gouvernement EU est un mélange compliqué au possible de pouvoirs très diverses qu’aucun terme autre que « union » n’a fait consensus pour le qualifié depuis sa création. Ce dernier point n’est à mon avis pas négligeable dans la perception actuellement éloignée qu’ont les peuples européens des décisions de l’EU.

Le point piquant est que la structure fédérale Suisse, avec 26 cantons indépendants qui ont chacun leur propre constitution, est d’une complexité tout à fait comparable à la structure de l’union européenne avec 27 pays indépendants qui ont chacun leur propre constitution. Le système politique EU est incroyablement complexe et découplé du peuple par rapport aux pouvoirs des gouvernements.

En Suisse la liste des date de votations pour les 20 prochaines années est déjà publiée: Dates des votations des 20 prochaines années
Sur les 615 objets de votations ( Tableau en chiffres ) qui ont été actuellement éffectuées, 209 ( Tableau en chiffres ) sont des initiatives populaires, et 185 ( Tableau en chiffres ) sont des référundums faclutatifs. Donc presque les 2/3 des votations sont effectivement des demandes du peuple. Le reste sont des référendums obligatoires.

La liste pour la France: Référendum en France — Wikipédia Je crains que sur le côté officiel vous avez raison. Peut-être que certaines votations étaient tout de même la conséquence de pressions par le peuple via des moyens non officiels ?

2/3 des votations dont la question a été choisie par le peuple, c’est beau.

Pour être vraiment exacte dans les détails. la question de chaque votation a été choisie par la Chancellerie Fédérale avec la formule du style:

Êtes-vous pour [objet] « [sujet] » du [date].

L’objet étant « l’initiative » ou « la loi » dans le cas d’un référendum. Dans le cas d’une initiative, le sujet est le titre choisi par le comité d’initiative. Dans le cas d’un référendum, le sujet est le titre qu’a choisi le parlement pour le texte de modification de la loi.

Ce genre de formule, les citoyens suisses doivent y être habitués à la formuler aux-mêmes?
La chancellerie la contrôle, la précise et s’occupe surtout de la traduire dans les langues officielles les questions.

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Oui, l’habitude vient en votant:

Exacte.

En parlant avec un ami, nous avons partagés une question, à savoir : comment les suisses sont-ils passés à une démocratie où le peuple a un droit d’initiative? autrement dit : quel(s) fait(s) historiques expliquent que ce droit ait été une évidence dans leur système politique?

Est-ce le fait que les cantons se sont fédérés au fur et à mesure de leurs inclusions dans la confédération avec tous la volonté de rester souverain avec leur propre constitution?